LOW JACK

vendredi 17 mars
01h30 03h00
Le Club

LOW JACK

vendredi 17 mars – Le Club
01h30 03h00

LOW JACK

Celui qui occupait les franges les plus radicales du postpunk dans les années 1980 sous la désignation de « musique industrielle » refait aujourd’hui surface dans la sphère techno et bien au-delà. Sollicité par les labels les plus en vue du moment (In Paradisum, L.I.E.S., TTT, Delsin…) le français Low Jack – Philippe Hallais de son vrai nom – s’est emparé de ce riche patrimoine, non pour faire machine arrière et tomber dans un mimétisme convenu, mais pour se réapproprier certains de ses paradigmes esthétiques et les porter à leur paroxysme: il s’agit toujours de prolonger l’expérience de la transe en usant de sonorités dures, rêches et lancinantes. 

Originaire du Honduras, Philippe grandit en Bretagne entre Nantes et Rennes et se destine à devenir affineur de fromage, une passion à laquelle il n’a pas renoncé. Car en plus d’être un invétéré « crate digger », tombé dès son adolescence dans le chaudron du hip-hop et de la house, c’est un bon vivant et un fin gourmet, capable de s’exalter sur un vin naturel autant que sur sa dernière trouvaille musicale. Rien d’étonnant à ce que Philippe soit autant arrimé au terroir: il y a quelque chose d’alchimique dans sa façon d’appréhender le son, de faire converger la terre et l’éther, l’origine et la destination. Plus encore que le résultat final, c’est le processus de transformation auquel il semble surtout attaché, cette manière de s’approprier n’importe quel matériau sonore pour le disséquer, le distordre et l’élaguer jusqu’à en extraire un motif sonore répété comme un mantra. 

Le credo de Low Jack, c’est avant tout de sortir des sentiers battus, de prendre le contrepied des tendances, de ne jamais être là où on l’attend – en bref, d’affirmer une identité qui lui est propre et de ne pas céder au goût du jour. A cet égard, son disque Garifuna Variations (L.I.E.S., 2014), émulant la musique d’une peuplade insulaire des Caraïbes, était une vraie réussite. C’est le même souci de briser les codes qui caractérise Editions Gravats, le label qu’il a monté avec son compadre breton Jean Carval et dont les trois premières sorties (Gravats, Zaltan, Black Zone Myth Chant) tombent à point nommé pour déjouer les conventions d’une scène technoise devenue trop routinière. Low Jack s’est imposé avant tout par sa singularité: un pied dans le clubbing, l’autre dans l’expérimentation abstraite. Ses influences? Côté pile: les années acid-indus’ de Bunker Records, les déflagrations sinusoïdales de Pan Sonic, la techno désaxée de Cristian Vogel, le groove ésotérique et salace de George Issakidis, la ghetto house à la Dance Mania, le hip-hop East Coast et tous ces reliquats funk « tombés du camion ». Côté face: le noise à gros bras, la transe ethno-chamanique, l’improvisation free-punk, l’ambient post-industriel, la drone music ou le power electronics. Mais certainement pas cette club music bien dans les clous, conventionnelle et un peu bourrine sur les bords, qu’il joue parfois dans ses sets mais se sent bien incapable de produire. 

Quant à ses propres productions, si elles sont le plus souvent bâties autour de la frénésie rythmique, elles tendent plutôt vers l’introspection et le deep listening, puisant leur capacité d’envoûtement dans ses racines d’Amérique Centrale.

Percussions obsessionnelles, grondement sourd d’un moteur, venin des stridences, fréquences hélicoïdales…

La musique de Low Jack n’a plus grand chose à voir avec de la techno, mais s’apparente de plus en plus à une transe primitive et organique où des polyrythmies afro-cubaines se seraient substituées au métronome des BPM

© Low Jack